Achaïra n° 199 : Chronique du syndicalisme ordinaire : Contre le projet de nous réduire à des conteneurs de compétences

Chronique du syndicalisme ordinaire 01-2018

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Contre le projet de me réduire à un conteneur de compétences.

Voilà que l’entreprise se targue de valoriser mes compétences, comme d’autres valorisent les déchets, car il n’y a pas de petits profits dans cette société. Et se faisant, je me suis interrogée sur cette société où l’on ne s’intéressait plus aux personnes mais à leurs compétences !

Déjà, on n’avait pas trop rechigné quand les Services du personnel étaient devenus des Directions des Ressources Humaines. On nous disait à nous qui rechignons qu’humain c’était plus classe que personnel. Sauf que personnel c’était un substantif et qu’humain n’était qu’un adjectif qualificatif de … les ressources, à côté du stock des marchandises, des flux énergétiques, etc. Et se faisant le Service … du personnel avait pris du galon en devant Direction … des ressources humaines. Sans doute que le on ne gère pas pareil des ressources et du personnel. Ce dernier « on » le fait travailler, on l’exploite en prélevant la plus-value, quand à l’autre on le valorise, on le forme, le déforme, au final, on l’aliène comme on aliène une marchandise en attente de retour sur investissement, bon on continue quand même à l’exploiter mais pas seulement.

Avant, certains voyait comme un progrès le fait d’obtenir des qualifications dans le système scolaire qui permettaient via les conventions collectives et les grilles de rémunération de se situer dans des grilles par rapport à des diplômes, et pouvoir revendiquer une rémunération en rapport avec sa qualification. Ceux qui valorisaient ça ne voulaient pas voir qu’ainsi ils divisaient la classe des travailleurs en sous catégories. Mais cela était bien insuffisant pour la classe dominante, dirigeante, la classe des possédants, il fallait découper individuellement chaque dépossédés (Ursula Le Guin est décédé mercredi 24 janvier 2018 – hommage).

On apprend que désormais, l’université ne délivrera plus de formations qualifiantes, seulement des unités de valeurs et de compétences.

Le système scolaire est ici présent pour remplir des containers de compétences, celles utiles aux processus de production de richesse des possédants.

Ce conteneur a une fiche, elle s’appelle le curriculum-vitae, qui explique comment le produit, le conteneur de compétences, a été constitué, par quelles écoles il est passé pour le formater, dans quelles universités, où il a été testé dans ses premiers stages, un peu à quoi il peut servir.

Ainsi, l’acheteur de conteneur de compétences, choisira le conteneur qui dispose du plus de compétences dont il a besoin dans le processus actuel de production et s’en séparera lorsque ces compétences ne lui seront plus utiles.

Ces compétences, on en parle très tôt dans le système scolaire. Et ce qui caractérise ce système par rapport au précédent c’est la déshumanisation complète du processus. J’exagère en parlant de déshumanisation complète, il faut un minimum d’illusion d’humanité sinon le conteneur se déprime et se déprécie et il est dommage d’avoir ainsi investi dans de tels conteneurs pour les perdre. Il faut leur garder l’illusion démocratique, ils décident de la vie en dehors de l’entreprise, du moins le croit-il, il est formé pour devenir un citoyen par le système scolaire, enfin le croit-il et croit-il que ce système ne marche pas bien. En fait le système scolaire marche à merveille, il sélectionne les conteneurs en fonction des compétences qu’ils vont pouvoir porter, ce qui sont à faible capacité sont orientés vers des sortes de rebuts qui conduisent au chômage, dont il s’agit de jouer les politiques de réduction du chômage, alors qu’il a une fonction sociale bien établie, mais qu’il ne faut pas reconnaître pour ne pas déprimer. Et aussi, bien sûr, le conteneur doit être informé, correctement par des médias libres, mais appartenant aux possédants.

Qui ayant accepté d’être un conteneur de compétences, va demain se révolter contre un système de domination économique et politique ?

Quasiment plus que contre l’exploitation capitaliste, ce contre quoi il faut combattre le plus fort, avec le plus d’arguments, c’est l’aliénation généralisée du monde du travail, du monde des dépossédés.

Sinon, nous n’en finirons jamais avec les possédants !!

« Soyez résolus de ne plus servir, et vous voilà libres » …. (Etienne de La Boëtie)

Dans nos prochaines émissions, nous présenterons quelques-unes des multiples voies qui s’élaborent pour sortir des tentatives d’aliénation quotidiennes.

Philaud

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