« Une toute petite histoire de l’anarchisme »

« Une toute petite histoire de l’anarchisme »

de Marianne Enckell

En mai 68, lectrice, lecteur, étiez-vous seulement nés ? L’histoire de l’anarchisme ne commence pas dans l’insurrection étudiante et les grèves ouvrières de ce printemps-là, mais un siècle plus tôt, lorsque les ouvriers d’Europe et d’Amérique créaient leurs premières organisations, leurs premiers syndicats. Ou quand Proudhon revendiquait le mot : si c’est votre ordre qui règne, alors oui, je suis anarchiste !

Les anarchistes aiment se raconter des légendes, s’inventer des ancêtres et des héros. Il n’y a pas de mal à ça : sans dieu ni maître, le culte de saint Durruti, des saintes Louise et Emma, voire de saint Ravachol ne fait guère de dégâts, leur geste finit en chansons ou en T-shirts. Mais l’histoire de l’anarchisme est une histoire d’hommes et de femmes en lutte, avides de savoir et de changement social, de culture et d’idéal. C’est aussi une histoire d’erreurs et d’échecs, de confrontations et de succès, et d’une volonté qui n’est jamais abattue. Être exploité ou opprimé ne suffit pas à faire des anarchistes, il faut vouloir en finir avec la domination et porter en son cœur un monde nouveau.

L’histoire des anarchistes est largement absente des manuels et n’a percé dans le monde universitaire que depuis peu. Les lignes qui suivent donnent un aperçu, quelques bribes, des lignes de force, scandées par des chansons.

Ouvrier, prends la machine, prends la terre, paysan…

Quand les typographes et les ouvriers du bâtiment font grève à Genève, en 1868, des soutiens financiers leur arrivent de plusieurs pays d’Europe : les caisses de secours sont des outils essentiels de la solidarité, « en attendant que le salariat soit remplacé par la fédération des producteurs libres ». À cette époque, il n’y a pas de permanents syndicaux ni d’institutions ouvrières établies, mais seulement des sections de l’Association internationale des travailleurs, l’AIT ou « Première Internationale », qui existe depuis quelques années. Dès que les exploités et les opprimés s’organisent, ils savent qu’il leur faut des contacts internationaux pour être plus forts, mieux informés : la mondialisation ne date pas d’hier.

L’AIT fédère à ses débuts tous les courants autonomes du mouvement ouvrier, affirmant que « l’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes ». Mais Karl Marx et les siens veulent en faire un outil de leur politique, subordonner l’organisation ouvrière à la conquête du pouvoir politique et, de manière cohérente, contrôler les activités des sections depuis le Conseil général établi à Londres.

Contre ce centralisme autoritaire, Michel Bakounine et ses amis de la Fédération jurassienne pratiquent le fédéralisme, valorisent l’expérience de la Commune de Paris de 1871, donnent petit à petit forme à ce qui sera le mouvement anarchiste et anarcho-syndicaliste. Pas étonnant qu’ils se fassent expulser ! C’est presque toutes les forces vives de l’Internationale qui se solidarisent avec eux et qui soutiennent le congrès « fédéraliste » convoqué à Saint-Imier, dans le Jura suisse, en septembre 1872.

« L’autonomie et l’indépendance des fédérations et sections ouvrières sont la première condition de l’émancipation des travailleurs », déclare le congrès, qui propose la conclusion d’un « pacte d’amitié, de solidarité et de défense mutuelle entre les fédérations libres » établissant entre elles une correspondance directe et une défense solidaire, pour « le salut de cette grande unité de l’Internationale ».

Sa déclaration la plus connue et la plus citée par la tradition anarchiste porte sur la « nature de l’action politique du prolétariat » : c’est là qu’il est dit que « la destruction de tout pouvoir politique est le premier devoir du prolétariat », que « toute organisation d’un pouvoir politique soi-disant provisoire et révolutionnaire pour amener cette destruction ne peut être qu’une tromperie de plus et serait aussi dangereuse pour le prolétariat que tous les gouvernements existant aujourd’hui » et que « les prolétaires de tous les pays doivent établir, en dehors de toute politique bourgeoise, la solidarité de l’action révolutionnaire ». Difficile de faire plus simple, plus clair !

La branche fédéraliste ou antiautoritaire de l’AIT a eu des sections importantes en Italie, en Espagne et en Suisse, et des groupes moins nombreux en France, en Belgique, aux États-Unis, en Uruguay et en Argentine ainsi que des adhésions d’Allemagne et des pays nordiques. Elle a été le véritable creuset du mouvement anarchiste qui s’est développé dans ces régions. C’est au cours de ces premières années d’existence que la Fédération régionale espagnole, notamment, fait progresser la discussion sur anarcho-communisme et anarcho-collectivisme, et que Ricardo Mella et Fernando Tárrida del Marmol proposent le concept d’anarchisme sans adjectif, qui sera repris avec bonheur aux États-Unis par Voltairine de Cleyre.

L’histoire du mouvement anarchiste commence avec la fin de cette organisation générale de tout le mouvement ouvrier qu’était l’AIT en ses débuts. Les idées anarchistes, elles, ont pris vie littéralement avec Proudhon. Mais elles ont eu des précurseurs, et de taille.

William Godwin est le premier philosophe des Lumières à élaborer, en 1792, une conception opposant la « justice politique » à l’existence d’une sphère politique séparée, à proposer donc l’abolition des gouvernements et des États au profit du bien commun. Sa compagne Mary Wollstonecraft affirme haut et fort les droits des femmes, égalité et autonomie. Bien longtemps avant eux, Étienne de La Boétie avait créé le concept de « servitude volontaire », révélant une autre facette de la domination. D’autres auteurs critiques ou utopistes ont inspiré la pensée et les pratiques des anarchistes.

Aux États-Unis se développe au XIXe siècle un courant libertaire, hostile à toute ingérence de l’État et défenseur de l’autonomie personnelle. Des auteurs comme Josiah Warren, Stephen Pearl Andrews, Lysander Spooner et surtout Henry David Thoreau (la Désobéissance civile, écrit en 1849) sont aussi à leur manière des précurseurs de l’anarchisme.

Si tu veux être heureux, nom de dieu, pends ton propriétaire…

L’histoire de l’anarchisme ne commence ni ne finit avec les personnages de noir vêtus, une bombe sous le bras. Certes, la dynamite a été une des formes prisées pour en finir avec le vieux monde. En 1892, les bombes de Ravachol ont détruit les maisons de deux juges qui avaient condamné lourdement des camarades ouvriers pour avoir mené une prétendue émeute le 1er mai de l’année précédente. Le couteau de Caserio a tué un président de la République française en 1894, l’arme de Czolgosz quelques années plus tard un président des États-Unis. Quelques hauts personnages morts ou blessés, pour combien de militants assassinés froidement ou envoyés à vie au bagne ? Et la modernisation de la police internationale, avec la création du prédécesseur d’Interpol en 1898, pour surveiller et brider les subversifs

L’anarchisme propose une idée simple et claire : sans tyran, nous saurons vivre libres et solidaires. Qu’il s’agisse du tsar Alexandre II dans la Russie de 1880, du président Carnot dans la France des « lois scélérates » de la fin du XIXe siècle, plus récemment du général Franco qui a écrasé la révolution anarchiste en Espagne ou de Salazar le satrape du Portugal, les souverains ne sont pas à l’abri d’attentats anarchistes. Rares sont pourtant ceux qui en sont morts, les moyens mis en œuvre étant souvent dérisoires par rapport aux services secrets et aux forces de sécurité des dictateurs. Et d’autres que les anarchistes ont essayé de liquider papes et despotes, pour de bonnes ou de mauvaises raisons.

La « propagande par le fait » ne se résume pas au poignard et à la dynamite. Lorsque cette expression a été créée, elle signalait simplement le passage à l’action directe – affirmation, résistance ou contestation – en complément à la propagande par la parole et par l’écrit, ces outils traditionnels d’un anarchisme éclairé. Les anarchistes les plus légendaires, Ravachol ou Bonnot, sont des héros de pacotille ; mais qu’on lise les défenses d’un Clément Duval en 1887, d’un Emile Henry en 1894 ou d’un Marius Jacob en 1905 devant les tribunaux français, revendiquant l’expropriation des expropriateurs et le droit à l’autodéfense, ils défendent les mêmes valeurs qu’une Emma Goldman prônant et pratiquant le droit à l’avortement et à l’amour libre, qu’un Buenaventura Durruti pratiquant la « reprise individuelle » pour financer projets éditoriaux et soutien aux compagnons emprisonnés. Lorsque Michele Angiolillo tire en 1897 sur le Premier ministre espagnol, lorsque Gaetano Bresci tue le roi d’Italie Vittorio Emmanuele en 1900, lorsque Simon Radowitzky abat en 1909 le chef de la police argentine, responsable d’un massacre d’ouvriers lors de la manifestation du 1er mai organisée par la FORA, lorsque Kurt Wilckens liquide le lieutenant colonel Varela en 1923, révolté par l’assassinat sous sa responsabilité de 1500 ouvriers agricoles grévistes en Patagonie, il n’y a pas que les anarchistes pour saluer leur geste et se féliciter de la disparition des tyrans. Organisations ouvrières, journalistes, avocats, et jusqu’à l’opinion publique se mobilisent pour les soutenir ou honorer leur mémoire.

Dans d’autres cas, pour honorable que soit le mobile, le geste de révolte individuel peut avoir des conséquences terribles : qu’il suffise de citer l’anarchiste serbe Gavrilo Princip abattant l’archiduc François-Ferdinand d’Autriche en 1914 ou le conseilliste hollandais Marinus van der Lubbe boutant le feu au Reichstag de Berlin en 1933.

Mais les anarchistes sont les premiers à être victimes de la répression. Huit à dix ans de bagne pour avoir crié « vive l’anarchie » sur une terrasse de bistrot, pour avoir placardé un tract antimilitariste, pour avoir volé des lapins, tel était le tarif si on était un anarchiste connu de la police dans la France des années 1890. Vingt-deux années de prison pour Alexander Berkman pour avoir tenté d’abattre le directeur d’une entreprise qui avait violemment réprimé une grève à Chicago. La chaise électrique pour Nicola Sacco et Bartolomeo Vanzetti, arrêtés en 1920 aux États-Unis et exécutés sept ans plus tard pour un hold-up qu’ils n’avaient pas commis ; leur ami Andrea Salsedo avait été retrouvé mort sous la fenêtre d’un commissariat de police new-yorkais, tout comme le sera Giuseppe Pinelli à Milan en 1969. Les anarchistes américains d’origine russe ont été déportés à Saint-Pétersbourg dès après la révolution de 1917 ; les militants antifascistes allemands et italiens ont été contraints à l’exil ou envoyés en camp de concentration. Et l’histoire hélas ne s’arrête pas là.

Pas étonnant que l’étendard des anarchistes soit noir, couleur du deuil et de la révolte.

Don’t mourn, organize…

L’histoire de l’anarchisme traverse le mouvement ouvrier organisé.

C’est d’abord aux États-Unis, après la fin de la Première Internationale, que les travailleurs relèvent la tête et passent à l’action directe. Dans les années 1880, le ralliement se fait autour de la journée de huit heures, des centaines de milliers d’ouvriers font grève pour la revendiquer. Le 3 mai 1886 à Chicago, un meeting convoqué pour s’opposer aux briseurs de grève se fait brutalement disperser par la police, il y a des morts et des blessés. La manifestation de protestation organisée sur-le-champ finit en cacophonie : une bombe a tué et blessé flics et manifestants. La condamnation à mort de cinq anarchistes accusés à tort d’avoir inspiré cet attentat suscite une vague de solidarité sans précédent et un mouvement planétaire qui n’est pas prêt de s’arrêter : la journée du Premier Mai, journée du souvenir et de la lutte pour la dignité ouvrière, devient la référence de tout le courant syndical, du plus révolutionnaire au plus compromis. Mais la mémoire dominante évacue vite le rôle qu’y ont eu les anarchistes, comme les partis socialistes vont évincer les anarchistes de leurs réunions. De la Première Internationale, ils n’ont en effet retenu que le primat du parti politique sur l’organisation autonome des prolétaires.

Les anarchistes ripostent en développant leur présence sur le terrain des luttes ouvrières, en pratiquant l’action directe, en ouvrant des lieux comme les Bourses du travail. Au début du XXe siècle, la CGT française entend organiser l’ensemble des ouvriers en dehors de toute ligne politique ; selon la Charte d’Amiens, son texte fondateur, le syndicalisme se suffit à lui-même. En revanche la FORA argentine et la CNT espagnole, qui naissent à la même époque, sont des organisations révolutionnaires de type syndical qui, prônant l’abolition du salariat et le refus de la politique politicienne, visent le communisme libertaire comme but final. À une différence près, toutefois : la CNT est étroitement liée à « l’organisation spécifique », la FAI anarchiste, tandis que la FORA entend éduquer ses membres en son sein même pour les conduire à adopter le communisme anarchiste. Les Industrial Workers of the World, aux États-Unis, développent à la même époque des techniques originales d’organisation, d’action directe, de sabotage et de propagande : c’est dans ce cadre-là, par exemple, qu’apparaît le chat noir des anarcho-syndicalistes et que Joe Hill met des paroles révolutionnaires sur des airs de cantiques connus de tous : « Ne portez pas le deuil, organisez-vous ! » Le modèle des IWW, avec son refus radical des négociations collectives, se répandra au Chili, en Afrique du Sud, en Australie, où ses militants seront notamment en tête du mouvement antimilitariste en 1914. La SAC suédoise, quant à elle lutte contre le monopole de la centrale syndicale LO, développe le système du « tarif syndical » comme alternative aux négociations collectives. CGT et IWW ont de leur côté institué le label : on voit encore parfois, notamment sur des imprimés, l’indication « ce travail a été effectué par des ouvriers syndiqués ».

La discussion, entamée au congrès anarchiste d’Amsterdam en 1907 par Pierre Monatte et Errico Malatesta, dure aujourd’hui encore pour savoir si l’organisation syndicale suffit comme organisation révolutionnaire, si le syndicat est la cellule de base de la société future, ou s’il est intrinsèquement réformiste, ou encore s’il doit être doublé d’une organisation anarchiste « spécifique ».

Lorsque le Parti communiste d’Union soviétique cherche à prendre l’hégémonie sur le mouvement syndical international, les anarcho-syndicalistes redonnent vie à l’AIT en 1922, avec treize organisations représentant un million et demi de travailleurs. Elle fédère les luttes développées au cours des années précédentes, avec leurs armes spécifiques : grève générale, solidarité, boycott, sabotage, et développe les armes culturelles avec une série de revues de qualité comme Die Internationale en Allemagne ou le Suplemento de la Protesta en Argentine.

La crise économique des années 1930 puis le fascisme portent un coup dur aux organisations radicales. Les syndicats socialistes et communistes se replient sur des positions défensives ou nationales, les compagnons sont forcés à l’exil, les sections de l’AIT se vident de leurs membres dans plusieurs pays. La révolution espagnole et la guerre civile seront l’occasion d’un fort mouvement de solidarité, mais provoqueront aussi des divisions et des conflits inattendus.

Après des années de latence, on voit réapparaître aujourd’hui de solides mouvements anarcho-syndicalistes et syndicalistes révolutionnaires dans nombre de pays, sous diverses étiquettes.

Nostra patria è il mondo intero…

L’histoire de l’anarchisme traverse les révolutions du XXe siècle et les frontières. La Commune de Paris de 1871 avait attiré la solidarité active de militants de l’AIT d’Italie, de Pologne, de Suisse qui avaient participé aux combats ; et les communards qui durent s’exiler en Suisse, en Belgique, en Angleterre ou en Espagne y furent accueillis comme des frères.

Emiliano Zapata au Mexique a été inspiré par l’anarchiste Ricardo Flores Magón. Pendant les années révolutionnaires, de 1910 à sa mort en 1919, il mène ses troupes sous le drapeau de Tierra y Libertad, un slogan dont l’écho est arrivé jusqu’à nos jours : venu de la Russie du XIXe siècle, il est passé par l’Espagne pour retourner au Chiapas.

Dans la Russie révolutionnaire, de 1917 à 1921, les anarchistes – plusieurs sont arrivés de gré ou de force de leurs pays d’accueil, la France, les États-Unis – défendent l’idée des conseils ouvriers, les soviets, contre le pouvoir du Parti et de ses bureaucrates, avant que ces derniers ne les forcent à l’exil. En Ukraine, Nestor Makhno mène l’insurrection paysanne contre les Blancs contre-révolutionnaires, puis contre les Rouges qui veulent en finir avec les anarchistes ; dans l’île de Cronstadt, marins et soldats instaurent une Commune libre qui tiendra jusqu’à ce que l’armée rouge aux ordres de Trotsky l’écrase. Exilés à Berlin, puis à Paris et à Detroit, les anarchistes russes continuent leurs publications, débattent de leur expérience, participent à la construction des organisations, comme le montrent notamment la « plate-forme » élaborée par Piotr Archinov et la « synthèse » développée par Voline sur la base de celle de Sébastien Faure.

En Chine, des jeunes gens ayant étudié en France diffusent les idées anarchistes pour lutter d’abord contre les « seigneurs de la guerre », puis contre l’hégémonie du Parti communiste. Ils sont surtout implantés dans le mouvement ouvrier du sud du pays et actifs dans les grandes grèves de 1927 à Canton et à Hong Kong. Le romancier Ba Jin (Li Pei Kan) traduit les classiques anarchistes et publie plus tard une série de brochures en soutien à la révolution espagnole. En Bulgarie, les anarchistes ont participé au mouvement national révolutionnaire du XIXe siècle, cherchant à lui donner un caractère insurrectionnel. Pendant la dictature fasciste et la Seconde Guerre mondiale, ils survivent dans la clandestinité pour se réorganiser sitôt après : en 1945, leur hebdomadaire tire jusqu’à 30 000 exemplaires. À Cuba, les anarchistes publient leur premier journal en 1886 et sont rapidement actifs dans le mouvement ouvrier syndical et culturel. Ils sont aux premiers rangs des luttes contre la dictature de Machado et celle de Batista. Dans ces trois pays, les anarchistes ont été parmi les critiques les plus lucides des dictatures, les plus radicaux des révolutionnaires, avant que les partis communistes staliniens au pouvoir ne se défassent d’eux par la violence.

Dans les mouvements des conseils en Allemagne, en Italie et en Hongrie, en 1918-1920, les anarchistes ont mis toutes leurs forces et subissent les plus fortes répressions. Gustav Landauer, commissaire à l’éducation de la Commune de Munich, est assassiné en 1919, peu après Rosa Luxemburg et Karl Liebknecht, les leaders socialistes révolutionnaires ; le poète Erich Mühsam, après des années de prison, meurt assassiné en camp de concentration en 1934. La Commune de Budapest est écrasée dans le sang ; les occupations d’usines de 1920 en Italie, témoignant de la croissance du syndicalisme révolutionnaire, sont sabotées par les socialistes qui ouvrent la voie à la « contre-révolution préventive » organisée par les bandes fascistes et l’État.

Émigration et exil sont souvent le seul moyen d’éviter la mort violente ou les années de prison. Élisée Reclus vit en Suisse après la Commune de Paris, Pierre Kropotkine en est expulsé et trouve un refuge précaire en France, puis en Angleterre. Les Italiens Errico Malatesta et Camillo Berneri sont pourchassés d’un pays à l’autre. Les anarchistes juifs de Pologne, d’Ukraine et d’Allemagne essaiment à Londres (où un autre émigré, Rudolf Rocker, devient leur « rabbin goy »), aux États-Unis et à Buenos Aires, où ils publient longtemps journaux et livres en yiddish. Les exils successifs d’Emma Goldman et d’Alexandre Berkman ont donné son titre à un beau recueil de lettres, Nowhere at home, nulle part chez soi. Ou partout chez soi, quand partout on trouve des compagnons, on recrée des groupes, on échange publications et correspondance ?

« Notre patrie est le monde entier, notre loi la liberté », chantent les anars italiens. Déportés en Nouvelle-Calédonie après la Commune de Paris, Louise Michel et Charles Malato y rencontrent les Canaques et leur aspiration à l’autonomie ; fonctionnaire en Indonésie, Multatuli quitte ses fonctions pour dénoncer le colonialisme néerlandais dans son roman Max Havelaar ; étudiants à Londres, Jomo Kenyatta et Julius Nyerere suivent les discussions du groupe Freedom ; plus récemment, insoumis et déserteurs français et américains dénoncent les guerres impérialistes en Algérie et au Vietnam. Soutenir les luttes de libération « nationale » sans soutenir les États en devenir reste un défi aujourd’hui encore. L’apparition récente de groupes anarchistes en Indonésie, aux Philippines, au Nigeria, stimulés évidemment par des jeunes gens formés dans des universités du Premier Monde et nourris de l’internet, changera-t-elle la donne ?

Quand nous en serons au temps d’anarchie…

En 1901, Francisco Ferrer fonde à Barcelone l’École moderne, qui s’inspire du rationalisme scientifique et fait confiance au progrès. Elle vise la libération de l’individu et la formation d’hommes et de femmes capables de transformer la société. Elle prône la coéducation des sexes et des classes sociales, afin d’attaquer à la racine les préjugés et de préparer des générations futures lucides. Vers la même époque, Paul Robin et Sébastien Faure ont dirigé en France des écoles libres où la pédagogie était basée sur la liberté, la confiance, la mixité, la combinaison entre travail manuel et travail intellectuel. Mais c’est l’expérience de Ferrer qui aura le plus d’écho : après son assassinat en 1909, et portées par la vague de sympathie et de solidarité, des Écoles modernes, des Écoles Ferrer se fondent au Brésil, en Suisse, aux États-Unis, en Italie… La pédagogie active et les écoles alternatives actuelles se sont toutes inspirées, directement ou non, de ces prédécesseurs. En Angleterre (avec l’école de Summerhill entre autres) et aux États-Unis, les écoles libertaires sont encore nombreuses malgré les difficultés que leur fait le système officiel. Plus récemment il s’en est créé en Espagne (Paideia), en Australie (School without walls), en France (Bonaventure).

Il ne s’agit pas d’éduquer les enfants seulement : « La tâche révolutionnaire consiste d’abord à fourrer des idées dans la tête des individus » (Jean Grave). La première activité d’une organisation ou d’un groupe anarchiste est souvent la publication d’un journal, de brochures, de tracts. C’est par dizaines de milliers que se vendaient les textes de Kropotkine, de Grave ou de Malatesta publiés au début du siècle par les Temps Nouveaux. René Bianco a inventorié près de 2000 périodiques anarchistes de langue française de 1880 à 1980, les autres langues ne sont pas de reste. De la presse à main à la quadrichromie et aux photocopieuses performantes, la « propagande par l’écrit » est une arme de prédilection des anarchistes ; nous en témoignons encore ici.

« Devenons plus réels », disait Bakounine aux ouvriers de Saint-Imier en 1871 : que l’organisation révolutionnaire se double d’une « vraie solidarité fraternelle, non seulement en paroles, mais en actions, pas seulement pour les jours de fêtes, de discours et de boisson, mais dans [la] vie quotidienne ». Communautés et coopératives en sont un exemple ; par le passé, des individus et des groupes ont établi des « colonies libertaires », de Belgique (Colonie L’Essai) au Brésil (La Cecilia), de France (Aiglemont, Romainville, etc.) au Paraguay (Mosé Bertoni) ; en Uruguay, la Comunidad del Sur fondée il y a cinquante ans s’est reconstituée après un long exil en Suède ; après mai 68, on est allé faire du fromage de chèvre et manger des châtaignes dans des hameaux désertés de France du Sud, peu nombreux ceux et celles qui ont résisté à la dureté des conditions de vie. Dans leurs athénées libertaires et leurs bibliothèques populaires, les anarchistes espagnols ou argentins ont diffusé depuis un siècle culture, connaissances scientifiques et préparation révolutionnaire. Les individualistes, surtout eux, ont prôné et pratiqué les langues internationales, ido ou espéranto, manière d’abaisser frontières et barrières. L’objection aux impôts, aux vaccins, aux institutions du mariage, du vote et de l’armée participe de la même démarche. Aujourd’hui, c’est de par le monde que fleurissent les espaces autogérés, squats ou infokiosques où l’on essaie de vivre sans argent ni maître, où l’on invente de nouvelles formes d’échanges et de manifestations publiques.

Si les anarchistes ont soif d’une culture sans domination, des artistes leur ont offert de quoi l’enrichir. Les impressionnistes Pissarro, Luce et Signac, les peintres et graveurs Steinlen, William Morris, Frans Masereel, Karel Kupka, Man Ray, plus récemment Flavio Costantini, Enrico Baj, Cliff Harper, Soulas et d’autres ont donné des illustrations à la presse anarchiste et des œuvres originales aux caisses de solidarité. Joe Hill, Erich Mühsam, Eugène Bizeau, Stig Dagerman ont écrit poèmes et chansons, Joan Baez, Georges Brassens, Léo Ferré, Paco Ibañez, Fabrizio de André ont chanté dans des meetings avant les Poison Girls, les Black Bird de Hong Kong ou les Binamé bruxellois. Les films de Jean Vigo, d’Armand Guerra, de Jean-Louis Comolli, les représentations du Living Theatre ou d’Armand Gatti sont autant d’hommages à l’anarchisme.

A las barricadas, por el triunfo de la Confederación…

Le plus beau chapitre de l’histoire de l’anarchisme est évidemment la révolution espagnole de 1936, malgré ses suites tragiques. Pendant plusieurs mois, ouvriers et paysans ont vécu le communisme libertaire dans les usines et les villages, dans les milices, dans les familles, dans les services publics ; des dizaines de milliers de femmes ont participé à l’organisation des Femmes Libres. Mais ils devaient aussi faire la guerre pour défendre la nouvelle société qu’ils créaient.

La confédération anarcho-syndicaliste CNT, fondée en 1910, avait mis toutes ses forces dans l’éducation du peuple, la pratique de l’organisation et la préparation de l’insurrection. Avec la Fédération anarchiste FAI, des tentatives révolutionnaires sont lancées de 1932 à 1934 dans plusieurs régions du pays : constitution dans les villages de collectivités communistes libertaires, assaut contre les casernes et les mairies, qui renforcent l’enracinement populaire de l’anarchisme mais suscitent une répression démesurée et la polarisation d’avec la gauche politique. En juillet 1936, les anarchistes sont toutefois prêts à riposter au coup d’État du général Franco et montent « aux barricades, pour le triomphe de la Confédération », la CNT : le mouvement des collectivisations démarre aussitôt, en même temps que la constitution de milices.

La solidarité des compagnons étrangers est immédiate ; des centaines d’anarchistes français, italiens, allemands, argentins, suisses quittent leur travail dès le mois d’août 1936 pour aller se battre en Espagne contre le fascisme et pour la révolution sociale. Vingt-cinq anarchistes chinois arriveront jusqu’à Marseille avant de devoir rebrousser chemin. Des camions de vivres et de vêtements, sous lesquels sont souvent dissimulées des armes, cahotent à travers les Pyrénées et passent la frontière sous les vivats.

Bien différente est l’attitude des démocraties européennes et de la gauche socialiste et communiste, qui craignent la généralisation de la guerre et la victoire de la révolution et adoptent une politique de non-intervention. Elles ouvrent ainsi la porte à l’appui massif de Mussolini et d’Hitler aux fascistes espagnols : ils leur envoient troupes, avions et armement lourd. Ce n’est qu’en octobre que l’URSS change de tactique et encourage la constitution des Brigades internationales, sévèrement encadrées, dont une des missions sera de briser l’élan révolutionnaire du peuple au profit de la guerre.

Les fronts se sont multipliés ainsi que les victimes, les milices anarchistes manquent d’armes et de munitions, les usines collectivisées improvisent véhicules blindés et obus. Peu à peu, l’industrie tout entière devient industrie de guerre ou d’arrière-garde, et « la guerre dévore la révolution », comme l’écrit alors le libertaire français Pierre Ganivet. Dans son isolement, jugeant prioritaire la défense du front antifasciste, la CNT prend la décision discutable d’entrer en septembre déjà dans le gouvernement de Largo Caballero, puis d’accepter du bout des lèvres la militarisation des milices. Place est ainsi faite aux staliniens pour s’attribuer la direction de cette guerre. En mai 1937, ils s’attaquent de front aux anarchistes et au POUM à Barcelone, assassinant Camillo Berneri qui avait été un des plus fiers critiques de la participation de la CNT au gouvernement. Cette dernière, prise entre deux feux, ne sait qu’appeler au calme.

Les collectivités de Catalogne et d’Aragon seront bientôt reprises en main, celles du Levant tiendront encore plusieurs mois. En février 1939, Barcelone est prise par les troupes franquistes, en mars c’est au tour de Madrid. Des milliers d’anarchistes et de républicains sont massacrés ou emprisonnés, des centaines de milliers prennent la route de l’exil et se trouvent confinés dans des camps établis à la hâte sur les plages française de Méditerranée.

Le mouvement libertaire s’est reconstitué en exil, avec la CNT, la FAI et les organisations de jeunes et de femmes, avec les divisions inéluctables que provoque ce genre de situation. À l’intérieur de l’Espagne, la CNT s’est aussi reconstituée sans cesse dans la clandestinité, au prix de nombreux morts et d’interminables années de prison. C’est le même sort qui a échu aux guérilleros cherchant à remonter un mouvement de résistance et à nombre de militants ayant tenté d’en finir avec Franco, jusqu’à ce que celui-ci en finisse à lui seul en 1975.

Rue Gay-Lussac, les rebelles n’ont qu’les voitures à brûler…

Mai 68 n’a pas commencé au mois de mai 1968. Les étudiants avaient bien oublié que l’anarchisme avait relevé la tête en France et en Italie, dès la guerre terminée en 1945 ; on avait bien oublié, dans les années d’abondance, le courage de ceux qui publiaient des journaux, reformaient les organisations, renouaient les contacts. Dans leurs exils, les anarchistes espagnols ont contribué à maintenir la flamme du mouvement, même s’ils se sont posés parfois en modèles indépassables ; l’antifranquisme militant a sans doute été, tout autant que le mouvement contre la guerre du Vietnam, un des déclencheurs de Mai 68.

Depuis la prise du pouvoir des partis staliniens dans les « démocraties populaires » d’Europe de l’Est et en Chine, seules de faibles voix y témoignaient encore d’un fier passé anarchiste. Dans les pays occidentaux et dans les Amériques, les partis communistes s’arrogeaient la seule opposition bruyante au capitalisme et aux démocraties libérales. C’est dire si le monde s’est étonné de voir la graminée anarchiste reprendre racine.

Aux États-Unis, les vieux compagnons d’origine russe, italienne, espagnole ont eu eux-mêmes de la peine à se reconnaître dans les hippies et les étudiants en colère ; en Allemagne, il n’y avait qu’une poignée d’anciens, Augustin Souchy, Willy Huppertz, Otto Reimers, qui publiaient de modestes bulletins. En quelques années, les librairies se sont soudain remplies de livres de poche sur l’anarchisme (et sur tous les courants de gauche), rééditions, anthologies, essais; les professeurs ont commencé à accepter des recherches sur la révolution espagnole, sur Makhno et Cronstadt, des études de presse, puis des travaux féministes et de l’histoire orale. En quelques années s’est constituée une culture anarchiste de base, accessible et acceptée.

Dans l’Europe du Sud, l’anarchisme n’avait pas été totalement occulté, mais là aussi la diffusion des idées et des pratiques s’est accélérée, ainsi que celle du A cerclé sur les murs. Lorsque le Brésil a connu une brève période démocratique, des ouvrages étaient envoyés clandestinement au Portugal où la férule de Salazar interdisait l’étude de l’histoire du XXe siècle. Dans l’Espagne écrasée sous le joug de Franco, la jeune génération cherchait ses racines, interrogeait ses pères, publiait sous le manteau. Dès la mort du dictateur, des centaines de groupes ont adopté le beau nom de CNT.

En 1984, année symbolique s’il en est, quelques milliers d’anarchistes ont convergé vers Venise pour y écouter des conférences, participer à des débats, assister à des concerts, visiter des expositions, se raconter leurs pratiques. En 1993, ils étaient presque aussi nombreux à Barcelone pour l’Exposition internationale. Lieux privilégiés que ces grands forums pour faire se rencontrer non seulement des compagnons de langues et de cultures diverses, mais des générations différentes, tenants de l’anarchisme classique et jeunes squatters, universitaires chenus et punkettes bariolées. Entre ces deux réunions, la géographie de l’anarchisme avait pris de nouvelles dimensions : dans les pays d’Amérique latine et en Europe de l’Est se constituaient ou se reconstituaient des groupes, des publications, des mémoires. Ce développement multicolore et multiforme n’a pas arrêté depuis lors : les anarchistes ont bel et bien un avenir.

Tous les copains de la Commune ne sont pas morts sans rien laisser….

Ces quelques notes demandent bien sûr à être étoffées, si elles ont su piquer votre curiosité.

Max Nettlau est considéré comme « l’Hérodote de l’anarchisme », mais sa réputation oublie qu’il est avant tout historien des idées, et bien moins du mouvement. Pour les lecteurs francophones, ses ouvrages sont difficiles d’accès. Des auteurs récents ont suivi ses traces, Jean Préposiet (Histoire de l’anarchisme, 1993), Nico Berti (Il Pensiero anarchico, 1998). Peter Marshall (Demanding the Impossible, 1992) a tenté une histoire générale du mouvement anarchiste dans le monde, de ses luttes et de ses réalisations. Pour les grandes lignes, on peut bien sûr lire Daniel Guérin (l’Anarchisme, nombreuses rééditions depuis 1965, et l’anthologie Ni Dieu ni maître, rééd. 2000), regarder l’album de Domenico Tarizzo (l’Anarchie, 1978) et se passionner pour le beau roman de Michel Ragon, la Mémoire des vaincus (Livre de Poche). En collection Que Sais-Je, on préférera Gaetano Manfredonia (l’Anarchisme en Europe) à l’ancien Henri Arvon (l’Anarchisme). Les actes d’un colloque sur l’anarcho-syndicalisme dans le monde, tenu à Paris en 2000, ont été publiés sous le titre Histoire du mouvement ouvrier révolutionnaire. Dans les actes de deux autres colloques, la Culture libertaire et L’anarchisme a-t-il un avenir (ACL, 1997 et 2001), plusieurs chapitres parlent de l’histoire du mouvement. D’autres travaux portent sur une période ou un pays, et les biographies et autobiographies de militantes et de militants sont trop nombreuses pour être citées ici. En langue française, le catalogue de la librairie Publico à Paris, celui de La Gryffe à Lyon et la Feuille mensuelle d’informations du CIRA-Marseille proposent périodiquement la presque totalité des publications disponibles concernant l’anarchisme.

Des chansons qui rythment la geste anarchiste sont reproduites dans la brochure Un siècle de chansons (Lausanne, CIRA, rééd. 2001) et figurent sur divers disques. Deux auteurs ont récemment étudié Il Canto anarchico in Italia (Milano, 2001) en près de 400 pages. Et on trouve même du karaoké anarchiste sur l’internet.

Depuis le début des années 1970 surtout, plusieurs films ont raconté des épisodes de l’histoire de l’anarchisme. En ordre chronologique, citons d’abord l’Extradition (Peter von Gunten, Suisse, 1974), sur les relations entre Bakounine et Netchaïev et l’expulsion de ce dernier de Suisse. Sur la Commune de Paris, il existe nombre de documentaires et de fictions, comme par exemple la Barricade du Point-du-Jour (René Pichon, France, 1971). Sur la révolution mexicaine, le pire côtoie le meilleur ; on aimera Marlon Brando dans Viva Zapata (Elia Kazan, USA, 1952) ou le documentaire Zapata mort ou vif de Patrick le Gall (1993). Makhno a été mis à mal par le cinéma soviétique, et sauvé par Hélène Châtelain dans son documentaire Nestor Makhno, paysan d’Ukraine (France, 1996). Sur le syndicalisme révolutionnaire, il faut voir Joe Hill (Bo Widerberg, Suède, 1971) et les documentaires sur l’Allemagne (Anarchosyndikalismus, FAUD, 1996) ou la Suède (En Historia utan slut – Una historia sin final, SAC, 1995). Free Voice of Labour (Pacific Street Films, USA, 1980) relate les luttes des anarchistes juifs aux États-Unis. La Bande à Bonnot (Philippe Fourastié, France, 1968) et certains épisodes des Brigades du Tigre (série télévisée, France, années 1970) sont plutôt dans le registre de la légende, comme plusieurs fictions italiennes de la même époque. Le film de Montaldo, Sacco et Vanzetti (Italie, 1971) vaut bien les documentaires sur le même sujet. La révolution espagnole a été filmée au jour le jour, beaucoup d’extraits documentaires figurent dans Un Autre Futur (Richard Prost, France, 1988) et, avec des témoignages récents de femmes, dans Toutes nos vies – De Toda la Vida (Liza Berger, Carol Mazor, USA 1986) tandis qu’on sait encore le succès de Land and Freedom (Ken Loach, Grande-Bretagne, 1995). En Argentine, en Bolivie et en Uruguay, de nombreux documentaires relatent remarquablement des épisodes historiques. Sur l’histoire récente, outre les reconstitutions sur Mai 68, on cherchera à voir la série filmée par Dany Cohn-Bendit, Nous l’avons tant aimée, la révolution (France, 1986), et le beau reportage sur la rencontre internationale de Venise en 1984 réalisé par des compagnons de Hong Kong, A Living Song. Enfin il existe nombre de biographies filmées, diffusées en français notamment par la librairie Publico à Paris : Rudolf Rocker, Louis Lecoin, May Picqueray, Armand Guerra, etc.

Quant aux sites internet, ils proposent par milliers textes, histoires, biographies et images. On peut commencer par n’importe lequel, on arrivera toujours par des liens à trouver de quoi se cultiver. Les rédactrices et rédacteurs de Réfractions, par exemple, gèrent http://www.plusloin.org (la revue et divers textes),

http://www.anarca-bolo.ch/cira/ (catalogue de la bibliothèque du CIRA-Lausanne), http://www.nothingness.org/RA/ et http://raforum.apinc.org/ (recherches sur l’anarchisme),

www.atelierdecreationlibertaire.com (Atelier de création libertaire) et participent à quelques autres pages.

Extrait de Réfractions, n° 7, « Entrée des anarchistes », automne 2001.