chronique du syndicalisme ordinaire

Chronique du syndicalisme ordinaire n° 1 Lundi 2 décembre 2013

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Certains auditeurs le savent peut-être, j’ai, en dehors de mon engagement au cercle, quelques responsabilités syndicales qui m’amènent à échanger avec des syndicalistes de différents secteurs.

A propos du mouvement des retraites, l’un d’entre eux m’avoua que la mobilisation fut très difficile dans son secteur car son entreprise propose, vend des produits se substituant à des retraites défaillantes, car minées par les différentes réformes. Et les collègues ne voyaient pas comment ils pouvaient d’un côté lutter pour défendre les retraites et de l’autre faire leur travail de vendre ces produits qu’ils disaient remplacer haut la main les retraites actuelles.

A un autre moment, quand il s’est agit de mobiliser contre les essais de missiles à tête nucléaire au Centre d’essai des Landes, des syndicalistes d’un autre secteur nous ont demandé de ne pas soutenir cette mobilisation, car c’était leur emploi qui était en jeu avec ces missiles à tête nucléaire.

Ces deux exemples parmi de très nombreux autres m’ont amener à réfléchir à ce renversement de valeurs. Avant on adhérait à un syndicat et on avait un contrat (de travail) avec une entreprise ou un patron. Le syndicat avait un projet de société, des valeurs, des idées et combattait en leur nom. Le patron exploitait la force du travailleur et le payait plus ou moins bien pour cela. Mais c’était avant !

Maintenant, les entreprises ont des projets de société, affirment avoir des valeurs et les travailleurs sont appeler collaborateurs et on leur demande d’adhérer aux valeurs de l’entreprises. Par contre, des travailleurs, quand ils prennent encore la carte à un syndicat, le font de plus en plus nombreux comme s’ils passaient un contrat avec une assurance en attente d’un service en retour.

Les syndicats ne semblent plus portés par un projet de société, les travailleurs ne voient plus ce projet, à peine voient-ils la défense au quotidien de l’emploi, voire du salaire. Trop rarement le syndicalisme porte-t-il critiques ou réflexions sur le sens du travail effectué et propose-t-il des « reconversions » pour orienter le travail dans une autre direction plus conforme à leur projet de société, à leurs systèmes de valeur. Le syndicalisme paye ainsi la prédominance d’une analyse marxiste, réduite d’ailleurs à sa plus simple expression, avec la bataille pour le partage de la plus-value et la hausse des salaires, comme revendication quasi unique pendant longtemps. Ainsi, l’exploitation salariale a été réduite au seul salaire, le temps de travail, les conditions de travail et y compris l’objet du travail sont aussi des enjeux du combat syndical et restent trop négligés.

A contrario, l’entreprise devient un repère idéologique pour toute la société, qu’il s’agisse de la préserver, de réduire ses charges, sans se préoccuper de la redistribution de ses gains ou même d’organiser la société humaine sous le modèle de l’entreprise, avec ses logiques de réduction des coûts et d’exclusion des forces pas assez rentables.

Il est évident que passer une grande partie de sa journée en état de sujétion ne peut pas être sans impact sur l’engagement quotidien de chaque membre de la cité, du collectif ou de la commune. Mettre fin à cet état de sujétion doit redevenir un objectif comme corollaire à la perspective séculaire d’abolition du salariat et à la volonté de renversement du règne du capitalisme.

C’est donc bien une révolution de nature libérale qui a eu lieu ce dernier quart de siècle et c’est à un renversement complet que nous, anarchistes, appelons, avec la mise en avant de valeurs sociales, et un syndicalisme qui reconsidère l’urgence d’un nouveau projet de société. Le syndicalisme doit être secoué pour réagir avant que ne surviennent des évènements dramatiques …

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